Cette chronique est l’opinion d’Eric Deguerre, écrivain et professeur de français à Montréal. Pour plus d’informations sur Section d’opinion de CBCS’il-vous-plaît évaluez Des instructions.
Alors que nous suivons la polémique sur le projet de loi 96 en anglais et en français au Québec au cours des dernières semaines, nous semblons assister au retour du double isolement. Le fossé peut être observé à nouveau entre les membres les plus vocaux de chaque côté.
De nombreux francophones souhaitaient une approche plus agressive de la protection de la langue française au niveau du cégep – les collèges que les étudiants québécois fréquentent après la 11e année. Les groupes anglophones voulaient des garanties que leur droit de poursuivre des études en anglais serait protégé.
Le gouvernement de la Coalition Avenir Québec a opté pour une politique plutôt compliquée — obligeant les étudiants du cégep à suivre trois de leurs cours de base en français ou à suivre des cours supplémentaires en français — provoquant la colère des gens des deux côtés de la question.
Ce changement n’aura pas d’impact significatif sur la protection de la langue française. En même temps, l’indignation que nous voyons dans la communauté anglophone des cégeps semble injustifiée car il ne s’agit en aucun cas d’une tentative d’accommodement.
De nombreux étudiants anglophones du cégep craignent que leurs notes soient affectées s’ils doivent suivre plus de cours de français. Cela suggère que l’on n’en fait pas assez aux niveaux primaire et secondaire, et que les enseignants doivent être ouverts à mesure que les élèves s’adaptent à ce changement. Mais au final, cela reste une belle opportunité pour les étudiants d’améliorer leurs compétences en français, puisque les expériences d’affaires et autres expériences professionnelles au Québec se font souvent en grande partie en français.
Ce débat sur un changement subtil du programme linguistique du cégep sonne comme une tempête dans la théière. Si nous voulons vraiment améliorer les compétences en français des Québécois, les efforts devraient commencer beaucoup plus tôt que le collège.
Il me semble que les écoles primaires anglophones – accessibles aux élèves dont les parents ont été éduqués en anglais au Canada – n’ont maintenant que le nom en anglais. Les enseignants et les parents sont très fiers de la qualité de nos programmes d’immersion française, les élèves apprenant entièrement en français jusqu’à la troisième année ou même plus tard, selon l’école. Ces programmes intensifs visent à donner aux jeunes Québécois les meilleures chances de maîtriser le français dès leur plus jeune âge, afin de travailler et de s’épanouir dans notre société.
Du côté français, on observe un phénomène similaire – souvent au niveau du lycée, dans les écoles privées et les programmes internationaux. Ces écoles valorisent le temps qu’elles consacrent à l’enseignement de l’anglais, soulignant qu’il s’agit de la langue des affaires et de la communauté internationale.
Il me semble que ces prétendues écoles françaises et anglaises poursuivent le même but : le bilinguisme, et peut-être même un plus grand pluralisme des jeunes Québécois.
Atteindre cet objectif devrait leur donner les meilleures chances possibles pour l’avenir. Des portes s’ouvriront – professionnellement, mais aussi socialement et même au niveau personnel. Apprécier la littérature et le cinéma dans de nombreuses langues est une belle expérience qui enrichit notre humanité.
Si tel est l’objectif que nous poursuivons, nous passons à côté de la meilleure façon d’y parvenir. Garder l’anglais et le reste des élèves québécois dans des systèmes éducatifs séparés ne crée pas la mixité sociale nécessaire pour atteindre une véritable maîtrise d’une langue seconde.
Les élèves qui fréquentent l’école française finissent souvent par améliorer leur anglais grâce à des expériences qui leur sont utiles : télévision, cinéma, musique et jeux vidéo. Cela est dû à la force et à l’influence mondiale de la culture américaine – qui est peut-être aujourd’hui la raison la plus importante de la protection de la langue française au Québec.
Ne parler que le français en classe ne suffira jamais. Se faire des amis qui parlent la langue fera toute la différence – et les enfants font la plupart de leurs amis à l’école.
Je propose un système d’éducation qui peut être à 80 % en français et à 20 % en anglais du primaire au secondaire. Les cours de base peuvent être offerts en anglais et en français, et des ajustements peuvent être apportés en fonction de la compétence des élèves, en créant des programmes d’enrichissement et d’autres pour soutenir les élèves ayant des besoins spéciaux.
Mais l’objectif devrait être la maîtrise du français pour tous.
Je pense que cela conduira à une réelle intégration, une meilleure harmonie entre les groupes sociaux et, je l’espère vraiment, un français fort dans la société québécoise pour les décennies à venir – tout en saisissant l’opportunité de maîtriser l’anglais et le plus d’autres langues possible.
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