MONTRÉAL (Reuters) – Les partisans de la nouvelle loi radicale du Québec visant à promouvoir l’utilisation du français dans la province canadienne l’ont qualifiée de mesure la plus importante depuis près d’un demi-siècle pour protéger la langue dans une Amérique du Nord majoritairement anglophone.
Mais la loi adoptée mardi par une majorité de législateurs québécois fait face à une opposition féroce de la part des minorités anglophones, des entreprises, des défenseurs du secteur de la santé et des peuples autochtones alors que la province se dirige vers les urnes en octobre.
Rédigé par le gouvernement de la Coalition nationale du Québec (CAQ), le projet de loi 96 oblige les étudiants à suivre davantage de cours de français dans les collèges anglophones et touche des domaines allant des audiences à l’emploi.
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La langue demeure une question sensible dans un Québec majoritairement francophone, où le mécontentement face à la domination de la langue anglaise a conduit à la montée du parti séparatiste du Parti québécois (PQ) dans les années 1970.
En 1977, l’adoption du projet de loi 101 a fait du Québec la langue des affaires de tous les jours en français et a obligé les enfants immigrants à fréquenter des écoles primaires et secondaires en français, provoquant le départ de nombreux anglophones.
Déposer une demande de service en français
Un expert a déclaré que le projet de loi 96 ouvre la porte à des poursuites contre les magasins qui ne servent pas les clients en français. Auparavant, les Québécois refusaient le service en français et se plaignaient au chien de garde linguistique de la province.
Alexandre Fallon, associé chez Osler, Hoskin & Harcourt, a déclaré que la loi s’appliquerait également aux sites de commerce électronique exploités par des entreprises à l’extérieur du Québec, et que les risques de responsabilité accrus ont amené certaines entreprises à envisager de cesser de desservir les résidents du Québec.
«Beaucoup d’entreprises qui regardent ça disent OK, OK, je vais arrêter de servir les clients québécois parce que je ne peux pas les servir à 100% en français, donc je ne vais pas risquer une poursuite», a déclaré Fallon.
Recrutement bilingue
Les employeurs doivent désormais faire un effort raisonnable pour éviter de faire d’autres langues que le français une exigence de l’emploi. Cela peut rendre difficile pour les hôpitaux, par exemple, de fournir des services aux patients dans une autre langue.
Plus de papiers français
Les contrats doivent être mis à la disposition des consommateurs en français même si les parties souhaitent le faire en anglais, ce qui augmente les coûts de traduction. Fallon a déclaré que les procédures judiciaires devaient désormais se dérouler en français pour les entreprises.
Services aux immigrants
Les migrants ne pourront pas accéder à la plupart des services gouvernementaux dans une langue autre que le français six mois après leur arrivée. Le gouvernement du Québec a déclaré que les soins de santé seront exemptés de la nouvelle loi.
Préoccupations syndicales au sujet du projet de loi 96
Le premier ministre libéral Justin Trudeau a déclaré cette semaine qu’il avait des « préoccupations » au sujet du projet de loi 96, car le gouvernement fédéral est responsable de la protection des droits des minorités linguistiques.
Le chef de la CAQ et premier ministre du Québec, François Legault, s’est toutefois dit prêt à invoquer une soi-disant clause, qui permettrait au gouvernement provincial de contourner certains aspects de la Déclaration canadienne des droits sur des périodes de cinq ans.
Cette semaine, le ministre de la Justice David Lamty n’a pas exclu de contester la loi devant la justice.
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Reportage supplémentaire d’Alison Lambert à Montréal et de Steve Scherer à Ottawa; Montage par David Gregorio
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